MAGAZINE STRATÉGIES N°2003. 11 Juillet 2019

Le féminisme change de visage. Vive les femmes !

Même s’il change de visage, le féminisme se consolide et c’est une bonne nouvelle pour que les femmes trouvent davantage la place qu’elles méritent. Sur ce chemin pavé d’embûches, nous avons tous un rôle essentiel à jouer. Entretien avec Karine Mazuir, à la tête de l’agence Karma.

Quel est le nouveau visage du féminisme ?

La nouvelle génération perpétue les combats menés par le passé. Je suis mère de trois jeunes filles, et m’imprègne de leurs nouveaux idéaux, parmi lesquels la réappropriation de l’image de la femme. Beaucoup de tabous sont tombés. Sur les réseaux sociaux, on parle désormais de plaisir, de sexualité, de menstruations, d’entrepreneuriat féminin, de rondeurs assumées… Je suis fière que les femmes soient en mesure de casser les codes. Ce « girl power » change radicalement le visage du féminisme et remet en question des diktats encore profondément ancrés. Je pense que nous sommes au début d’une nouvelle ère pour parvenir à une unité et une harmonie entre les femmes et les hommes.

Le fait d’être une femme à la tête d’une agence de communication : est-ce une valeur ajoutée ?

Etre une femme à la tête d’une agence de communication représente une valeur ajoutée. C’est un atout pour les marques, mais aussi en interne, pour révéler le talent des équipes. Je crois en effet profondément aux qualités de ressenti particulier et en une forme d’énergie féminine. Mon équipe est composée de 80 % de femmes, dont la moyenne d’âge est de 28 ans. J’ai un côté idéaliste, au sens où je pense qu’il est possible de faire évoluer les mentalités, transformer les consciences et compenser la sous représentation des femmes à la tête des grandes entreprises. Elles sont seulement 14% à la tête des entreprises alors qu’elles représentent 48% de la population active !

Votre agence intervient-elle aussi au niveau de la stratégie des marques pour leur délivrer des conseils sur leurs approches et leurs messages ?

Le pôle Santé de l’agence karma fait 80% de son chiffre d’affaire sur le secteur santé beauté. Nous estimons que nous avons une vraie responsabilité pour aider nos clients à faire évoluer les stéréotypes. La publicité a « objectifié » les femmes, et il est important qu’elles ne se reconnaissent pas dans certains représentations

Le combat doit donc se poursuivre ?

Absolument. Si j’ai baptisé l’agence « Karma », c’est dans l’idée de « semer pour récolter, de faire attention aux idées, et de militer avec intelligence. Parce que le sexisme continue de sévir dans les entreprises, avec des inégalités persistantes en termes de salaires et de postes, il faut continuer à œuvrer pour détruire les mythes d’une société construite sur des principes patriarcaux, où l’organisation est basée sur des critères très masculins, auxquels les femmes doivent s’adapter. S’imposer au cours d’une carrière pour accéder à des postes de direction, c’est surmonter des obstacles, mais le St Graal, c’est d’y parvenir sans avoir perdu le féminin sacré. La société doit évoluer pour permettre aux femmes de vivre leurs destinées personnelles et professionnelles de façon épanouie. On devrait pouvoir diriger, enfanter et être pleinement soi ! Etre une femme, c’est une partition qui se joue dès l’enfance pour tracer sa propre voie, dans le respect de l’égalité !